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S’il est un domaine où la digitalisation a transformé les métiers, c’est celui des ressources humaines. Dans ce secteur marqué par le poids excessif de la gestion administrative, l’automatisation des processus bouleverse profondément le quotidien des salariés.

La transition a été douloureuse. Bien des diplômés en master ou MBA RH motivés par des cursus mettant en exergue la stratégie et les missions RH à forte valeur ajoutée se sont heurtés à l’obsolescence des outils. En décalage complet avec la complexité croissante de la législation et l’évolution du monde du travail, la gestion des ressources humaines (GRH) était au bord de l’asphyxie.

Aujourd’hui, les systèmes d’information se sont répandus, reléguant les tableurs ou formats papier au fond des archives. Des technologies innovantes dans le traitement des données ouvrent des perspectives inédites et les directions ont la maturité nécessaire pour aller plus loin.

Le volume considérable d’informations générées par chaque salarié au cours de sa vie professionnelle est une manne inexploitée. Pour tirer pleinement parti de la data RH, il est indispensable de respecter trois étapes essentielles de cette démarche : s’assurer d’une évaluation juste des enjeux, préparer un terrain fertile à la collecte et comprendre les différentes méthodes d’analyses disponibles. À la clé, une connaissance approfondie des collaborateurs, de leurs compétences et de leurs aspirations, et par conséquent une arme stratégique cruciale pour l’entreprise !

 

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Étape 1 : Comprendre les enjeux de la data RH

La protection des données sensibles

Au fil de son parcours dans l’entreprise, le salarié communique un nombre impressionnant de données de nature personnelle ou professionnelle. Outre les éléments liés à ses compétences et à sa carrière, un employé fournit des informations relatives à son identité, son lieu de résidence, sa situation familiale et même sa santé.

Ces informations privées, voire intimes, doivent être protégées en accord avec la législation en vigueur. Le RGPD (Règlement général sur la protection des données) encadrant le traitement des données personnelles sur le territoire de l’Union européenne prend tout son sens dans ce contexte. Les responsables RH sont les garants du traitement éthique des informations et il est primordial que les dispositifs actuels, outils d’analyse puissants, soient paramétrés avec précision en conformité avec ces obligations. C’est d’autant plus important dans un monde du travail en pleine mutation où l’accent est mis sur la mobilité, avec une frontière floue entre vie privée et vie professionnelle.

Les salariés sont en alerte sur ce sujet et de plus en plus soucieux de trouver un équilibre pour préserver leur qualité de vie. Par ailleurs, le travail collaboratif, nouveau mantra des entreprises, induit un accès plus diffus aux informations. L’organisation doit être particulièrement vigilante sur ce point afin de garantir la confidentialité. Toute défaillance dans ce domaine aboutit à une défiance du salarié et peut-être à une résistance. A l’inverse, les sociétés affichant une déontologie claire, au-delà du RGPD, et sensibilisant les employés sur le sujet, vont gagner la confiance de leurs équipes. Elles contribuent en même temps à renforcer leur marque employeur.

L’identification des besoins au service de la stratégie

Sans périmètre bien défini, le responsable RH peut vite se perdre dans la foule d’informations à sa disposition. Il doit donc faire des choix et déterminer au préalable les indicateurs à suivre compte tenu de sa stratégie. La définition claire des objectifs est un des enjeux majeurs de cette démarche.

Outre les données incontournables telles que celles dédiées à la paie ou à l’index de l’égalité professionnelle Femmes/Hommes, les datas recherchées aujourd’hui sont celles liées à la gestion des carrières ou celles visant à évaluer la performance et la productivité.  Bien exploitée, la data RH est un soutien précieux pour les départements des ressources humaines, qu’il s’agisse de la gestion des talents ou du recrutement.

Elle est également efficace pour développer l’engagement et la fidélité des collaborateurs. Grâce à la pertinence des indicateurs de pilotage choisis, les points forts ou les faiblesses de l’organisation transparaissent dans les tableaux de bord de la plateforme SIRH. Le taux d’absentéisme, le niveau de satisfaction des salariés ou le turnover, chaque problématique RH est associée à un ou des indicateurs susceptibles de révéler un dysfonctionnement.

Adopter les bons indicateurs est l’une des clés de la prise de décision stratégique. C’est ainsi que les grandes entreprises ou les PME tout comme le secteur public peuvent anticiper les changements, gagner en flexibilité et en performance dans la gestion de leur capital humain.

Étape 2 : Collecter les données de façon efficace

La digitalisation et la cohérence des plateformes SIRH

Cette première étape de collecte des données repose sur la digitalisation des processus, une démarche déjà accomplie ou en bonne voie dans bon nombre d’entreprises. Pour celles qui étaient à la traîne, la crise sanitaire a fait office de tremplin.

Sans dispositifs de gestion adéquats, la mobilité et la flexibilité adoptées par la plupart des structures sont une menace pour l’organisation et la productivité. Les plateformes SIRH (systèmes d’information ressources humaines) répondent à cet enjeu. D’abord centrés sur la paie et la gestion du temps, elles se sont progressivement enrichies, en intégrant des logiciels de gestion de la formation, des évaluations annuelles, ou encore du recrutement.

Cependant, la redondance des saisies et des reportings fragilise les analyses et se trouve pour finir en complète contradiction avec la philosophie initiale du SIRH qui se veut centralisateur. Pour une bonne exploitation des données, la rationalisation des plateformes SIRH est donc indispensable afin de garder une cohérence et veiller à l’intégrité des données. Par ailleurs, la disponibilité de l’information sur tous supports et l’actualisation en temps réel garanties par le mode SaaS (Software as a service) font partie de la gamme de solutions incontournables pour une exploitation efficace de la data RH.

L’acculturation des salariés à la data

On peut faire évoluer les outils et recruter des profils pointus pour traiter les données, mais l’efficacité dans ce domaine repose avant tout sur l’appropriation du sujet par l’ensemble des collaborateurs. Chacun doit comprendre les enjeux, adopter les bonnes pratiques et adhérer au concept d’automatisation de certains outils.

Si le salarié se sent dépossédé d’une partie de ses prérogatives ou mis en difficulté par l’outil, la réaction naturelle sera la méfiance. Il est donc nécessaire d’impliquer les équipes et de leur expliquer comment elles peuvent contribuer. Le salarié préfère par nature ce qu’il connaît et maîtrise bien, ainsi les formations visant à démontrer les avantages de cette approche par métier sont très utiles. La communication est de mise pour rassurer les équipes en toute transparence sur les actions mises en œuvre. C’est une transformation importante dans les sociétés qui ne sont pas toutes prêtes. Elle passe par l’accompagnement au changement, nécessaire pour susciter l’adhésion et bénéficier de tous les atouts de la data.

Étape 3 : Analyser la data RH

Le croisement des données pour une analyse plus fine

Les données peuvent donner lieu à des hypothèses erronées ou être biaisées suivant l’angle d’analyse choisi. Pour garantir une interprétation objective et fiable, il faut prendre du recul par rapport aux indicateurs. En recoupant différents critères, l’analyse prend corps et gagne en consistance.

Il existe des données naturellement complémentaires, par exemple le taux de satisfaction des salariés peut être rapproché du taux d’absentéisme ou turnover. Le croisement des données permet de multiplier les analyses et surtout de les affiner. Pour cela, il est nécessaire d’avoir une plateforme SIRH qui regroupe toutes les données de vos logiciels au sein d’un même portail. La réalité du terrain doit être prise en compte. Les chiffres parlent plus vrai lorsqu’ils sont confrontés au vécu des salariés ou des managers. L’expérience des RH est également précieuse pour comprendre les signaux faibles mis en évidence par les chiffres et vérifier les hypothèses avant de mettre en place les mesures adaptées.

Les méthodes analytiques pour aller plus loin

Les méthodes traditionnelles d’analyse sont limitées comparées à l’analytique RH. Avec sa capacité à traiter de grands volumes d’informations à l’aide de modèles statistiques, celle-ci ouvre la voie à de nouveaux champs d’analyse. Lors des recrutements par exemple, les outils peuvent repérer les points clés de chaque candidature et présélectionner des profils pertinents.

En matière de « talent management », notamment de mobilité interne, des algorithmes sont maintenant capables de faire le lien entre les compétences des employés, leur desiderata en matière d’évolution et les postes ouverts en interne : c’est le matching. Les connaissances manquantes sont également mises en lumière et permettent de déclencher des offres de formation adaptées. L’analytique des talents ou « people analytics » en est à ses débuts. Elle vise à comprendre les comportements des salariés afin de mieux les accompagner, de prendre des décisions stratégiques pertinentes et d’optimiser les performances de la société.

Le support de l’analyse prédictive

Ces méthodes d’analyse visent également à donner les moyens d’anticiper les changements. La prévision rendue possible par l’analyse prédictive est au cœur de cette démarche et offre de nombreuses opportunités stratégiques.

À partir d’un historique et des tendances passées de l’entreprise, à l’aide d’algorithmes puissants, la modélisation élabore des hypothèses sur l’avenir et décèle les problèmes avant même qu’ils ne surviennent. Elle s’adresse à l’ensemble du périmètre de la RH et aide notamment à gérer le développement des compétences, à anticiper les départs et stimuler l’engagement des collaborateurs. Cette technologie novatrice améliore le recrutement en trouvant des profils cohérents avec les contraintes du poste et la culture de l’entreprise. Elle octroie au RH une longueur d’avance.

La data RH fournit une géographie précise des ressources humaines. L’énorme volume de données RH était jusqu’alors souvent négligé par les principaux intéressés, faute d’appétence pour ce sujet en apparence trop technique et trop éloigné de leur cœur de métier. L’accélération de la digitalisation a permis de mettre en évidence cette richesse offrant l’opportunité d’une stratégie fondée sur des données concrètes au plus près de la réalité des hommes. Il n’en reste pas moins que ces informations n’ont de valeur que si elles sont utilisées à bon escient par des professionnels qui savent les décrypter. Elles ne peuvent pas remplacer le travail du responsable RH mais sont un allié de poids.